Une nouvelle « révélation »
"25 septembre 2001, La Dépêche du Midi révèle une information capitale: à Toulouse, les experts, Van Schendel et Deharo, sont parvenus à localiser « l’épicentre » de la détonation « au centimètre près » avec l’aide d’un expert géomètre. Selon eux « l’explosion est partie du centre du bâtiment, sous la masse d’environ 300 m3 de nitrate d’ammonium ». Une affirmation qu’ils vont soutenir pendant des mois, telle une litanie, jusqu’à ce qu’ils découvrent que leur thèse du mélange accidentel est en totale contradiction avec cette position initiale. Ce n’est pas un problème : il suffit, par un coup de baguette magique, de déplacer le point d’amorçage de l’explosion de… 30 mètres depuis le centre du hangar ! Chacun appréciera la justesse de l’expression « au centimètre près »… Extrait de "AZF : l’enquête assassinée" (p.82)
Nous allons suivre ici cette étonnante migration des nitrates.
"Dès leur arrivée sur le site, les enquêteurs ont pris la mesure des difficultés qui les attendaient. Il leur a d’abord fallu comprendre la géographie de l’usine ravagée et il leur faudra plusieurs jours pour en trouver des plans détaillés. Selon La Dépêche du Midi du 24 septembre 2001, la Direction régionale de l’industrie de la recherche et de l’environnement (Drire), chargée de veiller à l’application des directives Seveso II, dont relève l’ensemble du pôle chimique, n’a pas non plus de plans précis de l’usine et encore moins du hangar 221 où l’explosion vient de se produire. En attendant, les rescapés vont griffonner des croquis à l’intention des enquêteurs."
Extrait de "AZF : l’enquête assassinée" (p.77)
Les plans ci-contre sont tracés "à chaud" devant la police entre le 24 et le 28 septembre 2001 par des ouvriers et des cadres de l'usine (cliquez dessus pour les agrandir). Il ne sont malheureusement pas orientés sud/nord comme doivent l'être les cartes et les plans. On constate cependant que le tas principal n'est ni au contact du stock journalier entreposé dans le sas, ni même au contact du muret de séparation sas-tas principal. Les employés ne peuvent pourtant pas encore savoir ce que les experts vont imaginer des mois plus tard.On remarque aussi qu'alors que ces employés savent bien que ce hangar 221 contenait des "refus de crible" de nitrate d'ammonium, c'est à dire des nitrates déclassés, certains avalisent un plan sur lequel il est écrit "déchets" sur le tas principal de nitrates. Ne s'en sont-ils pas rendus compte ou bien l'ont-ils fait sous l'influence de quelqu'un ?
Peut-être s’agissait-il de tordre le cou à l’hypothèse d’un attentat. Pour ce faire on nous jure que l’explosion « partie du cœur du tas exclut a priori, une quelconque intervention extérieure ». C’est tout le contraire ! Au centre de ce grand bâtiment il est bien plus facile de se dissimuler derrière le tas haut de 3 mètres et d’agir en toute discrétion.
Le 5 juin 2002, le collège des experts principaux remet au juge Perriquet un premier rapport d'étape dans lequel figure un plan en page 22. Il est toujours aussi mal orienté.
On constate que le tas transitoire situé dans le sas et le tas principal ne sont ni en contact avec le muret de séparation ni en contact entre eux. Seulement voilà, les experts ne se sont pas rendus compte que ces plans, ceux des employés comme le leur, contredisent la thèse qu'ils ébauchent dans ce premier rapport d'étape, c'est à dire un mélange auto-détonant réalisé dans le sas (tiens donc, ce n'est plus au cœur du tas principal !) La détonation se serait propagée au tas principal par "sympathie" à travers le muret. Encore que pour que cela fonctionne, il faille que les deux tas soient au moins appuyés contre le muret, ce qui n'est manifestement pas le cas sur le plan du géomètre expert !
Aïe ! Lourde ambiance chez les experts !
Mais qu'importe finalement puisque le rapport définitif du 11 mai 2006 livre un nouveau plan en trois D (enfin correctement orienté) qui sera complaisamment distribué avec une animation vidéo à tous les médias qui en firent la demande. On pourra l'apprécier ici à sa juste valeur ...avec juste un peu d'esprit critique cependant.
Voilà comment "partie du cœur du tas" la détonation dont l'épicentre avait été déterminé "au centimètre près" est parvenue à migrer au fil des ans de plusieurs dizaines de mètres vers l'Est, en compagnie de 300 tonnes de nitrates !
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