Le nitrate d’ammonium (NH4 NO3) est à la fois un engrais azoté, le
nitrate d'ammonium agricole (NAA) et un constituant d’explosif, le
nitrate d'ammonium industriel (NAI ou NAEO). Sous ces deux formes, le
nitrate d'ammonium est fabriqué par l’action de l’ammoniac sur l’acide
nitrique. C’est un comburant fortement oxydant, c’est à dire qu’il
entretient la combustion de matériaux déjà enflammés, comme l’oxygène
de l’air entretient celle de l’essence dans un moteur ou plus
simplement quand on souffle sur un feu. Cet engrais remplace le guano
produit par les oiseaux de mer. Avant que l’industrie maîtrise la
synthèse de l’ammoniac, le guano du Chili était importé en abondance en
Amérique du Nord et en Europe.
Le nitrate d’ammonium est réputé stable ; il ne brûle pas mais sous
l’effet d’une forte chaleur, s’il est par exemple pris dans un
incendie, il fond à partir de 165°, puis il se décompose en émettant
les fumées rousses caractéristiques des oxydes d’azote (NOx). A 210°
par exemple, NH4 NO3 produit de l’eau et un gaz oxydant et anesthésiant
très toxique, le protoxyde d’azote aussi appelé oxyde nitreux (N2O) ou
« gaz hilarant » qui est utilisé notamment en anesthésie. Vers 250° il
y à formation de peroxyde d’azote (N2O2). Ce gaz lui aussi oxydant et
très toxique, mélangé à l’acide nitrique, est utilisé comme comburant
dans certains moteurs de fusées. Ces gaz peuvent finalement détoner au
bout de quelques dizaines de minutes, voire de quelques heures, à
condition que l’incendie ait lieu dans une enceinte confinée.
Le nitrate d’ammonium agricole (NAA)
est un engrais aussi dénommé ammonitrate ou ammonitre. Il contient
33,5% d’azote et combine une action « coup de fouet » à un effet
prolongé sur les cultures. Il se présente sous forme de granulés (ou prills)
blanchâtres enrobés dans une substance huileuse (Galoryl ou Fluidiram)
« anti-mottante » qui évite la prise en masse du produit.
Le nitrate d’ammonium industriel (NAI),
« Etiquette Orange » (NAEO) est quant à lui poreux. Il entre dans la
composition de l’ANFO (Ammonium Nitrate/Fuel Oil), un explosif civil
très répandu, malheureusement trop bien connu des terroristes. Il
contient 34,5% d’azote. Ces granulés ont tendance a s’agglomérer en
surface sous l’effet de l’humidité du fait de son caractère
hygroscopique destiné à une bonne pénétration du fuel. Une humidité qui
contribue à faire baisser sa température par la nature fortement
endothermique caractéristique du NA (absorption de la chaleur et baisse
considérable de la température dans son voisinage immédiat). Pour
détoner, l’ANFO qui est un explosif secondaire requiert l’apport
énergétique d’un détonateur ou explosif primaire.
Voir aussi le point de vue de Monique Mauzac, chimiste, directeur de recherche au CNRS.
Heureusement pour l'Association des Sinistrés du 21 septembre 2001, partie civile qui soutient l'accusation, son avocat, docteur en droit, dame le pion à Monique Mauzac. Sur son blog, à l'aide d'une courte vidéo, sous le titre « Ammonitrate d’ammonium et Marcellin Berthelot », le docteur édicte d’un docte ton, combien « l’ammonitrate d’ammonium est un explosif dangereux » (sic), puisque le grand chimiste Berthelot l’a démontré dès la fin du XIXe. L'avocat connaît bien son affaire : « ammonitrate d’ammonium » n’est rien moins qu’une jolie lapalissade ; dire ensuite d’un explosif qu’il est dangereux est un autre truisme et puisque l’on est dans le pléonasme, nitrate d’ammonium explosif en est un troisième. Un chef d’œuvre tautologique, en six mots seulement ; difficile de mieux faire … ou l’arroseur arrosé … avec de l’eau mouillée !
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