Quelques accidents et attentats liés au nitrate d’ammonium industriel ou à l’ammonitrate agricole
Nous avons répertorié les accidents liés au NH4NO3 (34 au total dont 20 incendies suivis de 14 explosions) mais nous avons aussi constaté qu’aucun d’entre eux ne peut être comparé, ni de près ni de loin à ce qui s’est produit à Toulouse. Dans tous les cas, soit les détonations ont été activées par un explosif primaire, soit par un incendie conjugué au confinement du nitrate. Nous avons aussi constaté que malgré la violence de certaines explosions qui ont creusé, comme en Corée ou en Iran , des cratères bien plus imposants qu’à Toulouse, nous n’avons pas trouvé de témoignages faisant état comme à Toulouse de deux phénomènes acoustiques. De plus, les détonations qui ont été enregistrées par les sismomètres à la suite des explosions d’Iran, de Corée, d’Espagne et de Roumanie, ont donné des signaux peu significatifs, de l’ordre de 1 à 1,2 sur l’échelle de Richter au lieu des 3,4 de Toulouse. Pour comparaison, l’effondrement des tours du WTC ont impacté le sol entre 2,1 - la première tour - et 2,3 - la seconde - . Sur l'échelle logarithmique, la différence avec les 3,4 de Toulouse est considérable.
4 octobre 1918 – Morgan (USA) Un incendie dans un atelier de chargement d'obus, produit des explosions projettent des ogives dans un magasin contenant 4 000 tonnes de nitrate d'ammonium. Plusieurs obus explosent mais une grande partie du stock de nitrates en barils reste intacte.
26 juillet 1921 – A Krieweld en Silésie (Pologne), on tentait de désagréger 30 tonnes de nitrate d'ammonium pris en masse dans deux wagons en y tirant une cartouche de 100 g d'un explosif minier. La masse explosa, au moins en large partie, tuant 19 personnes.
21 septembre 1921 – Une incroyable coïncidence de date ! Un stock de 4.500 tonnes de Mischsalz, un mélange de sulfate et de nitrate d'ammonium explose dans l’usine BASF d’Oppau en Allemagne, causant le décès de 567 personnes. Le produit étant repris en masse, des ouvriers voulaient le briser à la dynamite comme ils l'avaient fait près de 20.000 fois sans conséquences avec du nitrate d'ammonium pur.
29 avril 1942 – A Tessanderloo (Belgique) 150 tonnes de nitrates d’ammonium explosent en faisant plus d’une centaine de morts. Cette fois, les ouvriers qui avaient pris l'habitude de désagréger du chlorure de potassium à l'explosif ont cru pouvoir utiliser la même technique pour du nitrate d'ammonium pris en masse dans un silo voisin.
5 août 1940 – A Miramas, un wagon d'explosifs prend feu dans la gare de triage. L’incendie se propage à des trains de munitions puis à des fûts de toluène dans un parc voisin. Les fûts éclatent sous l’effet de la chaleur. Le toluène en feu s’écoule vers un stock de 240 tonnes de nitrate d'ammonium pur, en sacs. La forte température conduit à l'émission de fumées rousses, puis le stock finit par détoner. L'enquête conclut que la détonation avait été provoquée par l'explosion préalable d'un wagons de munitions qui avait projeté un obus sur le tas de nitrate chauffé par le toluène en feu. .
15 avril 1947 – Les soutes du Grand-Camp, un cargo français chargé de 2 300 tonnes de nitrate d’ammonium s’enflamment et finissent par exploser après plusieurs heures d’incendie en rade du port américain de Texas city. 576 morts et 4 000 blessés, des dégâts dans 90% de la ville.
28 juillet 1947 – Mêmes causes, mêmes effets, les soutes du cargo norvégien Ocean-Liberty prennent feu en rade de Brest. Après plusieurs heures d’incendie, alors qu’une foule de curieux s’est rassemblée sur les berges, le nitrate d’ammonium transporté par le navire explose causant le décès de 22 personnes. Comme à Texas City, l’incendie ajouté au confinement des soutes, à la proximité des carburants et aux difficultés techniques d’extinction du feu ont finit par provoquer l’explosion.
29 octobre 1987 – La décomposition d’un box d’engrais NPK dans la zone portuaire de Nantes provoque l’émission d’un nuage toxique long d’une dizaine de kilomètres et traumatise durablement la population. Le NPK est un engrais complexe composé d’Azote (N), de phosphore (P) et de potassium (K). Il avait été transporté dans les cales d’un navire ayant été préalablement remplies de blé puis il avait été stocké sur un lit de sciure de bois. Des câbles électriques vétustes, enfouis dans la masse d’engrais seraient à l’origine de l’accident dont le bilan s’élève à 3 employés légèrement intoxiqués et 70 000 personnes évacuées. Pas d’explosion.
13 décembre 1994 – Un incendie se déclare à proximité d’un stock de 5 700 tonnes de NA entreposé sur le complexe industriel de Terra Industries à Port Neal dans l’Iowa (USA). Le stock commence à fondre et une flaque d’ammonitrate liquide, plus sensible que l’ammonitrate en granulés, se forme au pied du tas. C’est alors que survint un choc mécanique important ; probablement la chute d’une poutrelle métallique. La flaque détone, tuant 4 personnes mais le reste du tas, faute de confinement et d’énergie suffisants n’explose pas.
5 août 1998 – Walden Ontario (Canada) un camion transportant 18 tonnes d’explosifs civils à base de NAI, et leurs détonateurs, percute une paroi rocheuse et se renverse. Le fuel du réservoir et les pneus s’enflamment. L’incendie dure 37 minutes. Il a été établi que la température avait atteint 1 170°quand le chargement finit par exploser sans faire de victimes ( Le 28 septembre 2001, lors d’un point presse, le procureur Michel Bréard cite le rapport d’enquête canadien qui suivit cet accident pour « démontrer » que les chimistes qui s’opposent à sa thèse ne connaissent pas toute la littérature consacrée à l’accidentologie liée au NA. Argument vain sans doute soufflé par certains experts. L’accident de Walden n’ayant évidemment aucun rapport avec ce qui s’est produit à Toulouse.) * in : La Dépêche du Midi du 30 septembre 2001, page 4
3 octobre 2003 – A Saint-Romain en Jarez, un incendie se déclare dans le hangar d’un arboriculteur où sont stockés quatre tonnes d’ammonitrate, de la paille, du foin, des cageots en bois et des bouteilles de gaz. Après 45 minutes, alors que les pompiers tentent en vain de combattre le feu (les poteaux d’incendie ne sont pas alimentés en eau !) , une violente explosion survient blessant grièvement 3 d’entre eux. Les bouteilles de gaz ont explosé, mettant en détonation le NA surchauffé.
18 février 2004 ¬– En Iran, le déraillement d’un train de 51 wagons dont 7 renfermaient chacun 420 tonnes de nitrate d’ammonium et d’autres des produits tels que de l’urée, du souffre et du fuel provoque un incendie suivi quelques heures après d’une terrible explosion causant le décès de 328 personnes dont le préfet du département.
22 avril 2004 – Encore une fois, mêmes causes, mêmes effets qu’en Iran cette fois, à Ryongchon en Corée du nord, un train chargé de 4 000 tonnes de nitrates d’ammonium déraille et entre en collision avec un wagon de fuel. Le feu prend et le mélange nitrate/fuel finit par exploser en creusant un cratère de 500 mètres de diamètre, dix fois plus grand que celui d’AZF. On déplore au moins 161 morts et 1 300 blessés.
9 mars 2004 – A Barracas au nord-est de l’Espagne, un camion qui transporte 25 tonnes de NA entre en collision avec une voiture. Un incendie se déclare et le gasoil contenu dans le réservoir du camion s’écoule en feu sur les nitrates répandus sur le sol. A l’arrivée des pompiers le chargement explose. Deux morts et un cratère de 15 mètres de diamètre.
24 mai 2004 – A Mihailesti en Roumanie 20 personnes dont 7 pompiers et deux journalistes sont tués par l’explosion d’un camion chargé de 24 tonnes d’engrais à base de nitrate d’ammonium. Mêmes causes, mêmes effets qu’en Espagne deux mois auparavant ; la catastrophe se produit à la suite d’un accident de la route suivi d’un incendie qui dure près d’une heure. L’explosion survient au moment où les pompiers se déploient. Le cratère, profond de 8 mètres mesure 15 mètres de diamètre. Adrian Fumu, l’inspecteur-chef du travail épilogue "Le camion contenait 24 tonnes de nitrate d'ammonium. Cette substance se dissocie et explose à 216 degrés. Les forces d'intervention devaient faire en sorte que cette température ne soit pas atteinte. Toutefois, dans une telle situation, il serait mieux d'isoler la zone et de laisser exploser le chargement, parce qu'aucune autre intervention n'est efficace".
30 juillet 2009 – Bryan au Texas (USA), dans l'usine El Dorado Chemical Company, une opération de soudure provoque un feu à proximité d'un stock de 557 tonnes de NA en vrac. Pris dans l'incendie le nitrate d'ammonium dégage d'épaisses fumées rousses (NOx) que le vent pousse en direction de la ville. Les autorités évacuent préventivement les 72 000 habitants mais craignant une explosion les pompiers n'interviennent pas sur le sinistre. En fin d'après-midi les matières inflamables ayant fini de se consumer, le feu s'arrête de lui même sans que la détonation redoutée ne se produise. Il est interessent de comparer ce sinistre avec celui de Saint Romain en Jarez le 3 octobre 2003. Deux hangars, qui ne sont donc pas confinés au sens détonique du terme. Dans le premier une détonation finit par survenir en raison de l'effet détonateur de l'explosion d'une bouteille de gaz à proximité du NA surchauffé; dans le second, aucune explosion magré la chute des structures du hangar sur le stock; l'énergie n'était pas suffisante pour faire détoner le NA. Soulignons que le mode de stockage et les quantités de NA de l'usine de Bryan sont comparables au hangar 221 d'AZF... voir ici la vidéo tournée depuis un hélicoptère.
Plus étonnent, nous avons relevé quelques accidents dont ont été victimes des apiculteurs qui utilisent la faculté qu’a le protoxyde d’azote « d’effacer » la mémoire des abeilles ; une faculté utile quand l’exploitant doit par exemple déplacer ses ruches. Pour ce faire, après avoir allumé son enfumoir, une à deux cuillérées de NH4NO3 sont jetées sur le foyer. Au bout de quelques instants une fumée rousse apparaît. Elle contient ...du protoxyde d’azote. Le nitrate d’ammonium spécialement prévu à cet effet s’achète en pharmacie et chez les revendeurs d'équipement apicole. Il ne peut pas détoner. Cependant, des apiculteurs peu scrupuleux ont crut économiser quelque argent en utilisant de l’ammonitrate agricole dans leurs enfumoirs qui en raison de son confinement leur a explosé entre les mains !
URSS – L’information est inédite (2008) : L’institut SEMENOV de Moscou admet que des explosions de NA se sont produites en Union Soviétique à l’époque où la censure interdisait toute divulgation de ce type d’événement. Bien que l’institut précise qu’elles survinrent à la suite d’incendies à proximité de stocks de NA, il ne nous a pas été possible d’en connaître les dates, les lieux et l’étendue des dégâts
Voir et entendre une onde de choc sismo acoustique comparable à celle qui a balayé Toulouse
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